le blog de l'athénée

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Coup de théâtre

Écrits de spectateurs (5) : Jean, deuxième volet

Posté le : 15 sept. 2010 07:15 | Posté par : Clémence Hérout
Catégorie : Une Maison de Poupées

Je vous l'avais annoncé en octobre 2009 : avec ce blog, j'écris tous les jours à onze mille personnes. Je ne vois donc pas pourquoi je serais la seule à parler alors que beaucoup d'entre vous ont certainement des choses intéressantes à dire.

Je vous ai donc appelés à la rescousse, vous, mes chers lecteurs. Laetitia, Pierre, Jean et Jérôme ont déjà répondu à l'appel en m'envoyant leurs textes et/ou photos parus sur le blog tout au long de la saison.
Jean, spectateur très fidèle de l'Athénée et mécène du spectacle Vénus, avait donc déjà fait un bilan de la saison 2008-2009, que j'avais publié en janvier dernier : le revoici aujourd'hui avec son bilan de la saison 2009-2010 qui vient de se terminer.

 



« Comme au début de la saison 2009/2010 et pour la saison qui s’était terminée, voici l’heure de la synthèse, avec un peu d’avance par rapport à l’année dernière.

Les spectacles de chant ont été les plus nombreux (six sur douze) mais variés : opéra (plus ou moins récents), baroque et comédie. En moyenne, 7,8/10 (cette note est le seul moyen que j’ai trouvé pour relativiser et comparer les spectacles et les saisons, pardonnez-moi cet aspect professoral).

Le fait marquant est quand même (comme l’année dernière) l’extraordinaire qualité des prestations et la diversité des propositions (du XVIIe au XXIe).
Si le comique du Temps des croisades a permis de passer une bonne soirée, j’ai plus été sensible à Dans la Colonie pénitentiaire, peut-être par ce côté sadique partagé. Les amours des tourtereaux fut une belle découverte mais à ne pas consommer sans modération, cela deviendrait vite lassant.
Un peu déçu tout de même par Julie, non pas par la qualité de la musique, ni par la mise en scène, plus par la synthèse minimaliste du texte sur une œuvre de Strindberg, qui en occulte la portée.

Côté One-(wo)man-show (9/10), deux propositions [NDLR : Les Règles du savoir-vivre dans la société moderne et Les Garçons et Guillaume, à table !] dont la qualité est incontestable, sur le texte, la mise en scène et l’interprétation. J’ai admiré la robe de mariée de Mireille Herbstmeyer dont le reflet sur le sol verni était d’un effet très esthétique. L’aisance de Gallienne et sa façon de faire ont permis un texte parfois cru sans choquer les plus prudes.

Enfin, les quatre pièces de théâtre (8,5/10) très différentes les unes des autres. Minetti et Serge Merlin ont été un moment de grand plaisir par la maîtrise du texte, de la diction, de… tout (avec un bis repetita grâce à Extinction au Théâtre de la Madeleine).
Puis j’ai enfin pu voir La Cantatrice chauve après l’avoir ratée l’année dernière dans sa version chantée. Étonnant !
Si la Maison de poupée(s) fut "classique" mais plus intéressante que celle des Amandiers, Vénus fut une expérience extraordinaire : d’abord la découverte des répétitions, des choix techniques puis la générale et enfin les représentations. Belle progression où on se rend (enfin) compte de toute la difficulté à monter un spectacle, de la gestion du temps et de la pression car il n’est pas possible de reporter la date des représentations. Certainement, ces spectacles doivent être douloureux à monter, comme des accouchements.

En synthèse, la programmation d’une grande diversité nous a permis de découvrir un large panel de savoir-faire des comédiens et des techniciens mais aussi la multiplicité des types de spectacles dans le temps. L’homme est terriblement créatif.

La force de l’Athénée reste aussi et surtout son équipe technique que bien des théâtres privés pourraient envier. Cela permet des propositions de spectacles de grande qualité techniques même si on peut craindre pour l’avenir quelques portions congrues. Il suffit de voir les programmes de la saison prochaine à l’Opéra comique par exemple pour se rendre compte que la salle sera de moins en moins utilisée.
En lisant le blog, j’ai découvert que Le Père prenait quatre jours de montage… pour trois représentations seulement. Que de frais pour si peu de spectateurs en cumul sur les représentations !

Au final, la note est de 8,25/10 avec un minimum de 7. Je suis donc extrêmement satisfait de ma saison de spectateur (!!). Je vais donc continuer à m’abonner en espérant pouvoir renouveler l’expérience de Vénus. Merci à tous et aussi au contribuable malgré-lui (pour certains).»


Jean nous livrera peut-être un troisième bilan à la fin de cette saison 2010-2011 qui commence le 23 septembre prochain avec Oh les beaux jours de Samuel Beckett dans une mise en scène de Robert Wilson !

Bonne journée.


PS : dans les messages qu'ils m'ont laissés sur le blog, certains ont émis des doutes concernant la photo de Rome que j'ai publiée hier pour témoigner de mes vacances : ah là là, se coltiner les 551 marches menant à la coupole de la Basilique Saint-Pierre en plein mois d'août avec son appareil photo de quatre kilos pour se faire ensuite soupçonner d'avoir emprunté la photo sur internet… Quelle ingratitude !

Coulisses

La petite boutique de souvenirs

Posté le : 25 mai 2010 08:10 | Posté par : Clémence Hérout
Catégorie : Une Maison de Poupées

Bonjour, j'espère que vous allez bien après ce lundi de Pentecôte qui fut férié à l'Athénée.

L’équipe d’Une maison de poupées a quitté l’Athénée samedi. Quelques souvenirs en vrac:

La petite lampe d’enfant posée en avant-scène.

 

Olivia Brunaux (rôle de Nora) et Gil Isoart (conseil chorégraphique).

 

L’ombre de Xavier Carré (créateur des lumières) dans le décor conçu par Virginie Leforestier (scénographe).



Alexis Danavaras (rôle du docteur Rank) en coulisses.

 


Féodor Atkine (rôle de Torvald) en coulisses.

 


Bernard Mazzinghi (rôle de Krogstad) en coulisses.

 


Olivia Brunaux (rôle de Nora) et Bernard Mazzinghi (rôle de Krogstad) en coulisses.

 

Alexis Danavaras (rôle du docteur Rank) et Emmanuelle Grangé (rôle de Kristine) en coulisses.

 

Emmanuelle Grangé (rôle de Kristine) en coulisses.

 

En coulisses, Emmanuelle Grangé (rôle de Kristine), Féodor Atkine (rôle de Torvald) et Alexis Danavaras (rôle du docteur Rank) regardant et commentant la pièce par écran interposé.

 

 

Les pâtisseries grecques qu’Alexis Danavaras (rôle du docteur Rank) m’a offertes: sans doute les meilleurs gâteaux que j’ai jamais mangés.

 

Le petit bateau fait par Xavier Carré (créateur des lumières) avec un billet d’entrée au spectacle.

 

Le piano de Claire-Marie Le Guay dans le décor d’Une Maison de poupées lors de ses concerts du lundi 17 mai.

 

 

Un extrait du tchat qui a eu lieu mercredi 19 mai avec Nils Öhlund sur le site de l’Athénée:
«Julien: Bonjour, je voulais tout d'abord vous remercier pour cette mise en scène ! Avez-vous déjà une idée de la prochaine pièce que vous mettrez en scène ? merci beaucoup
Nils Öhlund: J'ai besoin d'achever cette histoire d'abord, et de retourner sur les planches en tant qu'acteur. Mon travail de metteur en scène se nourrit de celui d'acteur et inversement.
Inge: Avec cette traduction, il me semble que Nora est moins infantile que dans les versions habituelles, et le texte du XIXe était peut-être plutôt dans ce sens ?
Nils Öhlund: Le génie d'Ibsen est de dynamiter ce genre d'a prioris. Nora revendique son intelligence et son indépendance dès le début de la pièce, face à Kristine notamment. Ce qu'elle a entrepris pendant 10 ans n'est pas rien à mes yeux. Elle se bat contre l'image qu'on lui renvoie d'elle-même, tout en en usant.
Vanille: J'ai moi aussi beaucoup aimé la pièce et les propos très fins du metteur en scène sur les rapports de couple. Pourquoi avoir choisi de ne pas représenter les enfants sur scène? Est-ce pas souci d'économie?
Nils Öhlund: Les enfants sur scène, c'est comme des animaux ! Quand ça joue bien, ça fascine et ça sort de la pièce ! J'ai l'impression d'être au cirque. Et quand ça joue mal, ça me sort encore plus de la pièce. Je trouve que leur présence dans l'écriture est un peu accessoire. Scènes de la vie conjugale de Bergman m'a renforcé dans l'idée de ne pas les montrer.
judith: Je trouve très bien que l'on entende les enfants sans les voir. Je suis d'accord sur la réponse de Nils. Ce serait différent si la pièce tournait autour d'eux, ce n'est pas le cas dans celle-ci.
Louise: Bonjour, je voulais savoir pourquoi vous aviez choisi cette scénographie très spéciale qui ressemble à un plateau de cinéma, est-ce pour faire écho à la vidéo ?
Nils Öhlund: En tant qu'acteur j'ai toujours été fasciné par l'effet produit par un décor reconstitué en studio. Observer derrière la caméra des êtres qui vivent quelque chose dans un environnement, qui a le semblant du réel, mais qui reste complètement faux. Il m'a vraiment fait penser à une maison de poupée, comme celle des enfants dont on peut voir l'intérieur aussi! Pour moi c'est comme une cage de laboratoire, observer des spécimens. Nous sommes les spectateurs, invités à observer l'intimité de ces gens-là.
Coline: Est-ce que, comme le dit Stanislavki, tous les objets ont une signification et une utilité, dans votre mise en scène (et je suppose que c'est le cas!) Auquel cas, je me posais la question suivante:quelle est l'utilité du vase de fleur rouge? (il est utilisé, mais a-t-il une signification?)
Nils Öhlund: Les fleurs rouges sont présentes dans le texte d'Ibsen, mais normalement elles doivent ornementer le sapin. J'ai fait ce choix qui me paraissait moins cocasse aujourd'hui et permettait de brûler le document. La mise en scène est souvent l'art de trouver des solutions à des contraintes…»


La suite du journal d’Emmanuelle Grangé (rôle de Kristine) dont vous aviez pu voir le début sur le blog ici :
«12 mai, 14h
Lacrymaux
C’est tout de bois, de fantômes, le théâtre de l’Athénée ; du balcon de ma loge, je veux croire et voir qu’un flamboyant pousse dans la cour, cet arbre d’Afrique qui embrase tout.
C’est surtout de chair et d’infinies retenues, élégance des gens de ce théâtre-là. Oh ! si je les citais tous, je me traiterais, aussitôt dit, bougresse d’actrice, de maternaliste sur un podium de remise de prix moliérisable, alors, non, sacrebleu, Vous, Gens de l’Athénée, sachez que, tous les soirs, vous nous emportez, nous soutenez si bien…
Derrière la porte de chaque loge, un drôle de cérémonial se concocte : l’acteur s’isole, œuvre à des préparatifs singuliers comme brosser pour la énième fois le cheveu, se gargariser d’une ultime dose de gelsenium, éructer en douce ou en sonore tous les miasmes du fameux trac…
Tout se lit lorsque, dans le foyer, nous nous retrouvons, costumés, guindés à quinze minutes de la représentation. Chaque soir est une finale unique de coureurs de fond. Oyez, voyez les visages blêmes, on penserait que tous viennent de pleurer, il y a du blanc et puis du rouge sur la peau, dans les yeux,  des mains froides, des mains moites, des embrassades, des "qu’est-ce que je fous là, je serais mieux chez moi", des rires —c’est toujours ça de pris—, un gros de solennel et un désir gros comme ça de marathonner encore en  équipe dans le texte d’Ibsen !

Sur scène, des larmes de joie, de colère, d’épuisement, de retenue, visibles ou non, c’est le texte qui traverse les yeux et déboule de vie.

 
23 mai, 18h : terriblement fatiguée, pourquoi ai-je mal à l’épaule droite? Tu sais quoi, oui, ce péremptoire  éphémère de la représentation théâtrale…

"Torvald : Ne plus rester assis, là, seul, à m’ennuyer. Et toi, ne plus faire souffrir tes yeux bénis et tes petites mains toutes lacérées.
Nora sans qu’on puisse distinguer si c’est un soulagement ou un regret : C’est fini ... pour toujours ?
Torvald  acquiesce.
Nora : C’est si merveilleux, délicieux à entendre. Maintenant je vais te dire comment j’ai pensé que nous devrions aménager la maison après les fêtes."
 
(Une maison de poupéeS, H. Ibsen, acte I, scène 1, traduction, adaptation, mise en scène de Nils Öhlund, s’est jouée du 5 au 22 mai 2010 au théâtre de l’Athénée, Paris) »

 

Alexis Danavaras (rôle du docteur Rank), Emmanuelle Grangé (rôle de Kristine), Féodor Atkine (rôle de Torvald), les cheveux d’Olivia Brunaux (rôle de Nora) et Bernard Mazzinghi (rôle de Krogstad) sortant de scène pendant les saluts.

 

 

 

Après Une maison de poupées, c’est Benjamin Lazar, que vous avez peut-être déjà vu à l’Athénée dans L’autre monde ou les états et empires de la lune en 2008, qui arrive dès jeudi dans Les Amours tragiques de Pyrame et Thisbé de Théophile de Viau.

Bon mardi !

Entretien

Trac, horlogerie, garçonnière, pyramide et violoncelle - interview

Posté le : 21 mai 2010 08:08 | Posté par : Clémence Hérout
Catégorie : Une Maison de Poupées

Olivia Brunaux et Féodor Atkine interprètent respectivement le rôle de Nora et de Torvald dans Une maison de poupées mise en scène par Nils Öhlund.

Rencontres croisées dans la loge de chacun avant une représentation:


«Olivia, tu interprètes un rôle considéré comme mythique. Quelles sont ses difficultés particulières, à part que tu as de la concurrence cette année à Paris ?
— Que le rôle soit déjà interprété ailleurs dans d’autres mises en scène ne me dérange pas, puisque je ne suis tout simplement pas allée voir les autres versions… La vraie grande difficulté de départ à vrai dire, même si cela va peut-être te paraître idiot, c’est la longueur du texte: j’ai rarement eu un texte aussi long à apprendre et m’y suis prise vraiment très à l’avance.
Une autre difficulté résidait dans la dimension personnelle de l’interprétation: l’une des idées principales de Nils Öhlund étant l’écho que ce texte d’Ibsen a en chacun de nous aujourd’hui, il fallait éviter de mélanger ma vie et mon rôle, faire abstraction des résonances que le personnage peut avoir chez moi...
Enfin, Nora était un rôle de jeune femme pour moi —c’est d’ailleurs l’un des rôles que j’ai passé à ma sortie du Conservatoire il y a quelques années, à l’Athénée en plus! Mais pour Nils Öhlund, Nora et Torvald formaient un couple plus âgé qui devait avoir vécu ensemble assez longtemps.

— Tu as donc déjà joué le rôle de Nora à l’Athénée?

— Oui, il y a vingt-quatre ans. C’était à ma sortie du Conservatoire national supérieur d’art dramatique dont le théâtre était en travaux… J’étais très en colère, car je n’allais pas passer mon examen de sortie dans les locaux du conservatoire mais à l’extérieur, à savoir la scène de l’Athénée! Mais j’y suis donc revenue vingt-quatre ans plus tard pour faire une Nora vingt-quatre ans plus vieille…

— C’est un personnage qui te poursuit…

— Oui, pourtant je suis plus à l’aise dans les rôles comiques, mais on m’en propose rarement pour m’offrir plutôt des rôles de pauvres filles un peu tristes, parfois au bord de la dépression, voire qui commettent un meurtre ou se suicident... Alors que je prégère les comédies à la Blake Edwards, que j’ai adoré joué dans Vent de panique de Bernard Stora, et que mon rêve aurait été de jouer dans La Garçonnière, tu sais, ce film en noir et blanc de Billy Wilder avec Shirley MacLaine !
J’ai vraiment le trac en général, et encore plus sur ce rôle de Nora, car le travail est très riche et intense. Nils Öhlund est un vrai metteur en scène dans le sens où chaque réplique est soutenue par une demande précise de lui: à chaque réplique, chaque geste, chaque déplacement, je pense à ce qu’il m’a dit, car tout est réglé comme une horlogerie. Tout est toujours sur le fil, et parfois je me demande si je vais arriver au bout de la représentation!...

— Nora annonce-t-elle le féminisme, à ton avis?

Une maison de poupées aborde évidemment le féminisme, mais il s’agit surtout d’une pièce sur le couple. On a donné le pouvoir aux hommes dans le couple pour je ne sais quelle raison alors que le couple n’a pas de sexe et que nous sommes tous des individus: nous avons tous la même peau… J’aime particulièrement chez Ibsen cette partie féminine que beaucoup d’hommes n’assument pas: on sent qu’il comprend bien les femmes, en tout cas qu’il les éprouve.
Bien sûr, il ne s’agit pas d’un féminisme radical dressant les femmes contre les hommes, mais c’est une pièce qui pose quelques questions. Par exemple, pourquoi les femmes gagnent-elles moins que les hommes dans la France de 2010? En quel honneur?»


En sortant de la loge d’Olivia, on trouve celle de Féodor Atkine à gauche au bout du couloir:


«La grande majorité des critiques que l’on peut lire dans la presse ou sur des blogs s’accordent pour reconnaître la dimension nouvelle qui est donnée au rôle de Torvald, que tu interprètes dans cette Maison de poupées
— Mais pas seulement Torvald! Dans son adaptation, Nils Öhlund a voulu mettre en exergue les caractères essentiels de Kristine, Krogstad, Rank et Torvald autour de Nora. Il s’agit à mon sens d’une excellente idée, car dans les autres traductions, les autres personnages n’étaient là que pour étayer celui de Nora. Nils a donné un autre équilibre à la pièce, et son travail a été formidable à ce niveau-là.

— On évoque souvent la difficulté du rôle de Nora, mais celui de Torvald, son mari, me semble aussi très complexe, non?
— On peut effectivement tomber dans tous les écueils avec ce rôle: tomber, à cause du texte et de la situation, dans un côté presque caricatural du personnage qui deviendrait purement et simplement manichéen, une sorte de macho stupide, paternaliste, un peu vulgaire et sans émotion qui ne comprend strictement rien et ne comprendra jamais rien.
C’est un véritable écueil que l’on a réussi à éviter dans la mesure où, malgré sa rigueur et le fait qu’il soit promu à un poste à responsabilité sociale particulière, il a une immense tendresse et une certaine écoute. Et, incontestablement, quand il est confronté sans échappatoire possible à sa propre incompréhension, à sa propre bêtise et à son incapacité foncière à écouter, il est bien obligé de reconnaître la réalité des faits: il le fait, et c’est intéressant.
Mais effectivement, il aurait pu devenir terriblement excessif, hâbleur, stupide et n’être que la représentation d’un schéma mental masculin qui, étonnement, est encore en vigueur…

— Ce schéma est donc pour toi toujours actuel: ce n’est pas toujours ce que l’on a pu entendre dans les différents commentaires de la pièce...
— Seuls des hommes peuvent oser dire que le sujet de la pièce est dépassé. Au contraire, j’ai entendu nombre de femmes dire: “quelle modernité!”. Très peu de choses ont changé, non pas dans les faits eux-mêmes, mais dans l’état d’esprit. Je ressens au quotidien le poids des stéréotypes.
C’est quelque chose qu’on n’arrivera peut-être jamais à dépasser, parce que ces stéréotypes proviennent d’un élément fondamental essentiel et ineffaçable: la femme a un rapport au cosmos, à l’universel, à la création pure par le simple fait d’enfanter que l’homme ne connaîtra jamais. Il ne peut même pas imaginer ce que cela peut être.
La relation au vivant, à la vie et à la mort, ce mysticisme concret qui est celui de la femme génitrice, est un élément qui a poussé l’homme à lui nier la valeur fondamentale qu’il pouvait avoir et à en concevoir un autre pour son propre profit: du fait de sa constitution, l’homme est devenu acteur de mort alors que la femme est actrice de vie.
Mais bien évidemment, cela ne s’arrête pas là, car cela l’a également poussé à devenir fondamentalement créateur! À l’heure actuelle, il existe des temples, des pyramides, des temples, des cathédrales, etc., qui sont aussi là pour pallier cette absence de capacité de création que l’homme, au-delà de son côté négationniste, a voulu avoir pour essayer de toucher à un divin quelconque que seule la femme pouvait approcher. C’est de l’ordre de la métaphysique.

— Je te pose donc la question rituelle: Une maison de poupées est-elle une pièce féministe?
— Une pièce féministe? Féministe? Non, c’est une pièce humaine; ou, plus exactement, le traitement de Nils Öhlund en fait une pièce humaine. Si elle a pu être considérée comme un étendard féministe, c’est sans doute en détournant le propos d’Ibsen qui était de dévoiler les travers d’une cohabitation mâle-femelle, mais dans les deux sens. Nora par exemple, si l’on se réfère à ce qui est écrit, travestit la réalité d’une façon pathologique...
C’est plus une pièce humaine, un drame équilibré dans la version de Nils, et non pas quelque chose de purement orienté. On en est arrivé à réaliser une pièce qui n’est pas dogmatique, je crois.

— Le 11 mai dernier, tu étais l’invité du Partage de Midi sur France Musique où tu as évoqué les œuvres de Pêteris Vasks, qui est un compositeur letton contemporain. J’étais vraiment très heureuse que tu en parles, car il s’agit d’un artiste exceptionnel encore bien trop peu connu en France…
— Oui, je l’ai découvert grâce à un concert retransmis sur Arte. Ma femme et moi avons été bouleversés. Je trouve ses œuvres immenses, il sait déchaîner les émotions d’une façon extrêmement concrète, et c’est magnifique. C’est du niveau de Gustav Mahler, pour moi.»

Puisqu’il serait injuste que seuls Féodor Atkine et moi-même connaissions les œuvres de Pêteris Vasks ici, voici, grâce à la magie de YouTube, le deuxième mouvement de l’une de ses œuvres, Musica Adventus. Bonne écoute!

Si vous n'entendez rien, cliquez ici pour l'écouter sur YouTube.

 

Une maison de poupées se joue encore pour trois représentations à l’Athénée: ce soir et demain à 15h puis 20h.

Coulisses

Quartier libre

Posté le : 20 mai 2010 04:44 | Posté par : Clémence Hérout
Catégorie : Une Maison de Poupées

Le résumé d’une soirée à l’Athénée avec Une maison de poupées:

des conversations dans les coulisses aux applaudissements du public en passant par le spectacle en accéléré, dix minutes de son que vous pourrez écouter en fermant les yeux ou en faisant autre chose car, contrairement à mes habitudes, aujourd’hui il n’y aura pas d’image.

 

Si vous n’entendez rien, cliquez pour aller sur YouTube.




Une maison de poupées se joue jusqu’à samedi.

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