le blog de l'athénée

Retrouver les billets du blog postés de 2008 à 2018

Ils ont blogué pour l’athénée pendant 10 ans
Pleins feux

L'âme russe

Posté le : 10 nov. 2010 07:10 | Posté par : Clémence Hérout
Catégorie : Orchestre de Paris : 4 concerts pour 4 quatuors

Depuis quelques années, l'Athénée programme aussi de la musique.

Cette saison, l'Athénée et l'Orchestre de Paris proposent "Quatre concerts pour quatre quatuors" où les œuvres sont choisies en fonction des pièces jouées à l'Athénée.
En résonance avec le cycle Tchekhov (Oncle Vania, Les Trois Sœurs et La Cerisaie), vous pourrez ainsi entendre samedi le concert "musique russe".

Cette fois-ci, le quatuor sera à cordes : deux violons, un alto et un violoncelle, qui interpréteront des œuvres de Taneïev et Tchaïkovski.

J'entends d'ici les plus expressifs d'entre vous se demander intérieurement "mais c'est qui, Taneïev?" (voyez comme je suis perspicace). Taneïev (ou Tanayev, selon les transcriptions), est un compositeur russe né à Vladimir (ouest de la Russie) en 1856 et mort près de Moscou en 1915.
Homme extrêmement cultivé qui cumulait les savoirs en mathématiques, musique, histoire, langues et philosophie, il séjourna deux ans à Paris où il fréquenta les compositeurs français Saint-Saëns, Fauré et Gounod. Professeur au Conservatoire de Moscou avant d'en être le directeur, il fut un musicien très actif dans bon nombre de domaines : la pédagogie donc, mais aussi le piano (élève de Nicolas Rubinstein, il donna des concerts en tant que pianiste), la théorie musicale (il écrivit des ouvrages sur les techniques du contrepoint et du canon) mais aussi la composition.

Ses connaissances extrêmement pointues en matière de technique musicale et son intérêt pour les lettres et la philosophie donnent aux œuvres qu'il a composées une très grande perfection formelle autant qu'une sensible élévation spirituelle.
À la fois simples et élégants, ses quatuors à cordes contribuent à donner à la musique de chambre russe des bases formelles qui lui manquaient sans doute, le genre ayant été beaucoup négligé par les compositeurs russes jusqu'à Tchaïkovski (qui fut le premier compositeur russe à écrire un quatuor à cordes).

Son Quatuor à cordes n°3 op.7, qui sera joué samedi, fut justement dédié à Tchaïkovski dans sa première version, puis au compositeur Rachmaninov dans sa seconde : Taneïev décida en effet de remanier sa partition après avoir entendu des quatuors de Rachmaninov. Ample et très maîtrisé, ce quatuor porte également des influences de Haydn, Beethoven et Schubert, considérés comme les maîtres du quatuor à cordes.

Taneïev fut d'ailleurs l'élève de Tchaïkovski, dont le Quatuor à cordes n°3 op.30 sera également joué samedi.
Et pour ceux qui se demandent qui est Tchaïkovski, rendez-vous dans le billet de vendredi.


Bon jeudi 11 novembre ! Les Trois Soeurs ne fait pas relâche en ce jour férié et se jouera donc aussi demain.

 

Merci à Pierre-Émile Barbier pour son article sur Taneïev
dans le
Guide de la musique de chambre paru chez Fayard.

Coulisses

Et mon tambour, tu l'aimes mon tambour ?

Posté le : 04 oct. 2010 07:20 | Posté par : Clémence Hérout
Catégorie : Orchestre de Paris : 4 concerts pour 4 quatuors

Bonjour à tous,
J'espère que vous avez passé un bon week-end.

À l'Athénée, le concert Variations sur percussions dont nous parlions sur le blog ici et a eu lieu samedi dans le décor de la pièce Oh les beaux jours.

Pour vous faire une idée sonore et visuelle du concert, voici la vidéo de quarante secondes que j'ai réalisée pendant les répétitions.



Si vous n'arrivez pas à lire la vidéo, cliquez ici pour la regarder sur le blog ou pour aller sur Youtube.

 


Oh les beaux jours se joue jusqu'à samedi ! Bon lundi.


Merci à Nicolas Martynciow, Eric Sammut, Emmanuel Curt, Florent Jodelet et Florence Alibert pour leur collaboration.

Perspective

Non, vous ne recevrez pas le billet en cinq exemplaires aujourd'hui

Posté le : 01 oct. 2010 08:25 | Posté par : Clémence Hérout
Catégorie : Orchestre de Paris : 4 concerts pour 4 quatuors

C'était la bérézina hier matin sur le blog : le billet a été envoyé cinq fois, le sondage n'était pas en ligne, on ne pouvait pas laisser de commentaire, bref, de quoi nous mettre de bonne humeur pour toute la journée !

Aujourd'hui les problèmes sont réglés : vous pouvez répondre à la question que je vous posais hier (comment choisissez-vous vos spectacles ?) ici, et vous pouvez même étoffer votre réponse en laissant un commentaire au billet. Je salue d'ailleurs les courageux qui ont réussi à répondre au sondage ou à me laisser un commentaire dès hier.
En tout cas, je suis désolée du désagrément que cela a pu vous causer. Si cela vous console, sachez que cela m'en a causé aussi.

Demain à 15h aura lieu le concert Variations sur percussions dans le décor de la pièce Oh les beaux jours.
Nous parlions du concert mercredi avec deux de ses interprètes ; et comme la percussion est un genre encore peu connu, n'hésitez pas à cliquer ici : vous pourrez voir un court extrait des répétitions et découvrir la poésie d'une œuvre de John Cage.

À demain à l'Athénée, ou à bientôt sur Oh les beaux jours qui se termine le 9 octobre !

Entretien

Jouer dans du carton

Posté le : 29 sept. 2010 07:09 | Posté par : Clémence Hérout
Catégorie : Orchestre de Paris : 4 concerts pour 4 quatuors

Depuis quelques années, l'Athénée programme aussi de la musique. Cette année, le cycle "4 concerts pour 4 quatuors" (en partenariat avec l'Orchestre de Paris) propose des concerts en lien avec les pièces de théâtre programmées.

Le premier concert aura lieu ce samedi à 15h. Les œuvres choisies par les musiciens, tous percussionnistes, sont en rapport avec Oh les beaux jours de Beckett et seront interprétées dans le décor de la pièce imaginé par Robert Wilson.


Conversation avec Éric Sammut et Nicolas Martynciow, membres de ce quatuor de percussionnistes et musiciens à l'Orchestre de Paris :

« — On vous a passé commande d'un concert en rapport avec Oh les beaux jours de Samuel Beckett actuellement à l'Athénée. Pourquoi avoir choisi ces œuvres de Bartok, Berio et Cage ?
Éric Sammutt : — Au départ, nous étions partis pour faire un concert à quatre : on réfléchissait chacun de notre côté et John Cage (1912-1992) est apparu comme étant le principal compositeur du concert : on joue ainsi deux de ses pièces. Peu de compositeurs de cette époque ont composé pour percussions : tout cela date de moins de trente ans… Mais l'on voulait tout de même y associer d'autres compositeurs, et en particulier Berio et Bartok dont l'esthétique nous semble répondre à celle de Beckett : on interprétera donc leurs duos pour violons, mais avec des percussions. Et nous avons complété avec des œuvres de Nicolas et moi-même : je compose plutôt pour claviers et Nicolas plutôt pour les peaux, nous sommes complémentaires…

— Je suis un peu surprise que l'on puisse interpréter des œuvres pour violons aux percussions…
Éric Sammut : — Les tessitures du violon correspondent aux instruments de percussions ! On peut jouer toutes les notes, seul le son est différent. Le but n'est pas d'imiter le violon, seulement de profiter d'autres compositions : on prend une pièce et on la transcrit dans un autre univers. Des artistes chinois ont monté Carmen de Bizet en chinois par exemple : on transforme l'esthétique, mais pas l'idée qui reste la même. On garde l'esprit musical, on essaie de le laisser intact : cela est possible avec certaines musiques, comme les œuvres de Bach par exemple, qui est le compositeur le plus transcrit —on peut le jouer sur des cailloux ou des morceaux de bois, ça marche ! C'est le compositeur universel. Alors qu'avec Chopin cela fonctionne moins, parce qu'il est plus pianiste que musicien : c'est l'esthétique du piano qui l'a rendu génial, tandis que le génie de Bach réside plus dans la musique que dans l'instrument… Bartok et Berio sont des musiciens de cet ordre là.

— Vous dites que John Cage vous est apparu tout de suite, pouvez-vous expliquer pourquoi ?

Nicolas Martynciow : — Je cherchais un rapport entre Beckett et la musique, je ne sais pas trop. J'avais déjà vu Oh les beaux jours : j'ai eu l'impression que l'esthétique de Cage était très proche du style de Beckett… Dès qu'on nous a proposé ce concert à l'Athénée, cela m'a paru évident. Je suis incapable de l'intellectualiser, c'est… C'est évident quoi.

— Disons, pour davantage expliciter votre choix, qu'effectivement les styles de Beckett et Cage mettent tout deux en œuvre la variation (c'est-à-dire la répétition d'un motif en le modifiant légèrement) et une certaine économie de moyens ; peut-être qu'il y a également chez les deux artistes une forme de conscience de l'absurdité de l'existence.
Vous allez jouer dans le décor d'Oh les beaux jours : qu'est-ce que cela vous inspire ?

Éric Sammut : — Il y a le monticule au milieu alors qu'on a besoin de place… C'est très risqué pour nous, car les percussions nécessitent bien plus d'espace et de temps d'installation que des violons ! Nous allons donc jouer avec l'espace du théâtre et peut-être utiliser les loges d'avant-scène pour y mettre des instruments.
Mais nous avons l'habitude de jouer dans des endroits insolites : nous avons donné des concerts dans des décors d'opéras, dans une usine de carton et même à Castorama, où l'on nous avait demandé de jouer de la musique avec leur matériel ! On a donc joué du Bach, entre autres, avec des perceuses, des marteaux, des tournevis…  Mais ce qui nous intéresse, c'est surtout la lumière : l'atmosphère lumineuse est très importante car elle change toujours l'ambiance. Si elle est dans des tons plutôt froids, on va essayer de réchauffer l'ambiance, car je trouve qu'il faut mettre de la couleur dans la percussion, que cela soit un son chaud, que l'on donne envie aux gens de voyager…
On a souvent l'occasion de jouer à l'étranger, mais très peu à Paris, alors pour nous ce concert est vraiment important, et nous espérons que beaucoup de gens viendront nous écouter...

— On a surtout parlé de vous en tant qu'instrumentistes alors que deux de vos compositions font aussi partie du programme. Pouvez-vous évoquer votre démarche de compositeur ?

Nicolas Martynciow : — J'essaie de mettre très peu d'instruments pour essayer d'utiliser au maximum les possibilités sonores de chacun : il n'y a pas d'instrument mélodique dans mes œuvres qui font ainsi entendre le rythme pur. Je joue beaucoup avec mes influences qui sont le jazz et la musique contemporaine, avec des clins d'oeil à Bartok et à Stravinski.
Quant à Éric, c'est un musicien très cultivé qui connaît énormément de musiques : il a l'oreille absolue et, quand il écoute un morceau, il le mémorise avec une facilité déconcertante, ce qui lui permet sans doute aussi d'agréger bon nombre de styles dans ses œuvres... Contrairement à moi, il utilise principalement des claviers dans ses œuvres où l'on retrouve aussi beaucoup d'influences et même de citations, qu'elles soient cinématographiques (le titre Lost in the ocean évoque ainsi deux films, Lost in translation et Ocean's eleven) ou musicales : il est passionné par le jazz et la chanson française par exemple. »


Variations sur percussions aura lieu ce samedi 2 octobre à 15h à l'Athénée Théâtre Louis-Jouvet dans le décor d'Oh les beaux jours.
Le programme musical est composé de 3e construction et She is asleep de John Cage,  de transcriptions de duos pour violon de Bartok et Berio, de Lost in the Ocean d'Éric Sammut et de Sweet Swaff de Nicolas Martynciow.
Le concert rassemblera quatre percussionnistes, Nicolas Martynciow, Eric Sammut, Emmanuel Curt  et Florent Jodelet.



PS : nous avions déjà évoqué ce genre de sujet sur le blog : Pierre, lecteur du blog et percussionniste de son état, m'avait envoyé un texte fort drôle sur la condition du percussionniste moyen à lire ici.

voir plus de billets