Une salle qui programme un spectacle dispose de plusieurs solutions juridiques pour établir le contrat qui va les lier : les principales sont la cession, la coréalisation et la production.
Le contrat de (co)production
Dans le cadre d’un contrat de production, le théâtre (souvent en lien avec d’autres salles de spectacle, et cela s’appelle alors un contrat de coproduction) prend en charge le financement du spectacle, est parfois l’employeur des artistes et récupère intégralement les recettes de billetterie.
Il est un partenaire privilégié des artistes de la naissance du projet à sa réalisation, est l’un des piliers du spectacle et a la responsabilité de son montage technique et financier : il faut ainsi trouver l’argent nécessaire, maîtriser le budget, prendre en charge les démarches administratives, trouver des dates de tournée, accompagner les artistes, se positionner comme employeur, en bref faire en sorte que le projet se crée autant artistiquement que techniquement ou humainement. Dans certaines grosses structures disposant d’un atelier décors et/ou costumes, les éléments du spectacle sont même fabriqués par le théâtre ou l’opéra en question.
Produire un spectacle relève donc d’un réel engagement sur la durée, d’un investissement financier et humain ainsi que d’une prise de risque importante : car si le producteur récolte les recettes, il est aussi redevable des éventuelles pertes.
Le contrat de cession
Le contrat de cession est plus simple : une compagnie représente les artistes du spectacle. Employeur des artistes, la compagnie monte le projet au niveau financier, artistique et technique et le propose aux salles comme, si vous me permettez l’expression, un produit fini, ou un spectacle clé en main.
La salle qui désire programmer un spectacle l’achète à un montant fixé par la compagnie et qui lui permettra de couvrir les charges engagées pour les décors, costumes, droits d’auteurs ou salaires mais rarement de faire des bénéfices, pour des raisons de coûts déjà élevés pour un théâtre mais également de statut, les compagnies étant la plupart du temps des associations à but non lucratif.
Le théâtre paye donc un montant forfaitaire correspondant au coût global du spectacle et récolte les recettes de billetterie. Il se doit de fournir une salle en état de marche, c’est-à-dire avec le plateau technique et le personnel nécessaire au montage, démontage, chargement et déchargement ainsi qu’à l’accueil du public.
Lorsqu’un théâtre programme un spectacle selon ce mode contractuel, l’engagement financier et humain est moindre que dans le cadre de la production, mais l’équilibre financier via les recettes de billetterie doit être évidemment maintenu.
Attention, il s’agit bien d’un contrat de cession du droit d’exploitation, c’est-à-dire que le théâtre a le droit d’exploiter le spectacle pour un nombre donné de représentations mais que celui-ci ne lui appartient pas.
Le contrat de coréalisation
La coréalisation a une définition plus floue qui varie selon les contrats et se rapproche de la cession. La compagnie est considérée comme le producteur, la salle de spectacle comme l’organisateur.
Avec ce type de contrat, les risques sont globalement partagés entre producteur et organisateur, le prix de vente du spectacle n’étant pas fixé de la même manière que pour le contrat de cession : ici, la compagnie perçoit une rémunération proportionnelle aux recettes. En pratique, on établit à l’issue des représentations un décompte des recettes et le partage a lieu selon les pourcentages prévus par le contrat, par exemple 60% pour la compagnie (qui n’obtiendra donc pas d’autre rémunération) et 40% pour la salle -les pourcentages sont donnés à titre purement indicatif.
Il y a souvent un minimum garanti pour le producteur, c’est-à-dire que si le pourcentage des recettes à reverser à la compagnie n’atteint pas un montant minimum, la salle de spectacle est obligée de donner à la compagnie le dit montant afin de lui permettre de couvrir un tant soit peu ses frais.
L’Athénée Théâtre Louis-Jouvet utilise le contrat de coréalisation pour les spectacles qu’il programme, à l’exception notable de La Cantatrice chauve dont il est coproducteur avec l’orchestre Lamoureux et la compagnie des Solitaires Intempestifs.
Je vous expliquerai prochainement pourquoi et vous souhaite, en attendant, un beau mardi !
La Cantatrice chauve commence jeudi et, en attendant, vous pouvez aller écouter Claire-Marie Le Guay, pianiste en résidence à l’Athénée, pour un mini-récital gratuit à la médiathèque musicale de Paris demain à 19h ! Plus d’informations ici.