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Entretien

Riders to the chant

Posté le : 09 avr. 2009 07:32 | Posté par : Clémence Hérout
Catégorie : Artistes de la saison | Riders to the sea

Entretien avec Jacqueline Mayeur

Jacqueline Mayeur interprète le rôle de Maurya, la mère, dans Riders to the Sea : lorsque l’opéra s’ouvre, Maurya a déjà perdu son mari, son beau-père et cinq fils en mer. Interview à quelques minutes de la première :

“_ Maurya est-il un rôle de tragédienne?

_ Oui, et c’est très agréable, d’ailleurs : je n’ai jamais l’impression de chanter ou de jouer, mais vraiment de vivre ce rôle! La porte s’ouvre et je suis Maurya, ce n’est que lorsque je m’allonge à côté de mon fils mort que Jacqueline se réveille.

_ Qu’y a-t-il de particulièrement difficile dans l’interprétation de ce personnage?
_ C’est difficile nerveusement, du fait que c’est un drame. Jouer quatre soirs de suite n’est pas évident, car il faut retrouver une émotion nouvelle chaque jour! Ce qui est important pour moi, c’est de garder une émotion intacte et de toucher les gens qui nous écoutent : il faut renouveler chaque soir son interprétation en fonction de l’air que l’on respire et des choses que l’on vit…

_ Christian Gangneron, le metteur en scène, me disait que Riders to the Sea n’était pas un opéra triste : êtes-vous d’accord?
_ Je nuancerais tout de même un peu : tout le début est triste et Maurya est dans la douleur car on commence sur la perte d’un fils.  Dans cette société-là, sur ces îles-là et à cette époque-là, les filles sont moins importantes, car elles sont surtout vouées à se marier et à avoir des enfants. À la fin de l’opéra, Maurya n’a plus de raison de vivre car même si elle a tout perdu, elle a réalisé son destin, le but de sa vie étant de mettre au monde et élever des garçons. Elle accepte finalement son sort et le prend de manière positive.

_ Vous parliez des îles d’Aran, y êtes-vous déjà allée?
_ Non, malheureusement. À la création de Riders to the Sea, nous avons beaucoup étudié ces îles, j’ai vu le documentaire L’Homme d’Aran de Robert Flaherty, mais je ne m’y suis pas rendue. Si on reprend l’opéra, on ira peut-être là-bas!

_ Pourquoi les deux opéras de Vaughan Williams, Riders to the Sea et The Pilgrim’s Progress, sont-ils si méconnus en France?
_ Il y a beaucoup de choses méconnues, et c’est souvent quand les artistes meurent que les œuvres se révèlent. Vaughan Williams a été un peu éclipsé par Benjamin Britten ou Edward Elgar, mais le grand succès que l’on rencontre avec Riders to the Sea montre que les spectateurs sont très heureux de découvrir ces œuvres moins célèbres…

_ C’est rare, des rôles de femmes vraiment intéressants à l’opéra, non?
_ Il y en a! Je pense en particulier à Carmen de Georges Bizet ou à The Medium de Gian Carlo Menotti... Ce sont des femmes de caractère comme Maurya, même si elle ne résiste pas vraiment à sa vie. L’année dernière, nous avions créé, toujours avec la compagnie Arcal et la mise en scène de Christian Gangneron, Les Sacrifiées, un opéra de Thierry Pécou sur un livret de Laurent Gaudé : c’était l’histoire de trois générations de femmes algériennes confrontées à des situations terribles. Ce qui est bien avec la musique contemporaine ou méconnue, c’est que nous avons la possibilité de créer des personnages que personne  n’a interprétés avant nous et de les faire vivre pour la première fois…

_ Nous évoquions la langue particulière de Synge avec Christian Gangneron : a-t-elle été difficile à appréhender, pour vous?
_ Oui et non, car la langue va très bien avec la façon de chanter. J’y ai vraiment trouvé du plaisir, les sonorités sont plus ouvertes, moins pointues que l’anglais.

_ Étiez-vous déjà venue à l’Athénée Théâtre Louis-Jouvet?

_ C’est la première fois que j’y joue, mais je suis déjà venue en tant que spectatrice. La première fois que j’y suis allée, j’étais au conservatoire! La salle est magnifique, et le contraste entre les dorures du théâtre et l’austérité du spectacle risque d’être saisissant…”

Pour découvrir Jacqueline Mayeur, Elsa Levy, Sevan Manoukian, Patrice Verdelet, le choeur Thibaut de Champagne et l’orchestre du Grand Théâtre de Reims dans Riders to the Sea mis en scène par Christian Gangeron et dirigé par Jean-Luc Tingaud, c’est à l’Athénée jusqu’à samedi! Bon jeudi...