Vous avez dit journalisme ?
Catégorie : Rêve d'automne
Je faisais une erreur le 7 octobre en vous parlant de la place de Rêve d'automne dans les médias : certes, le spectacle a été beaucoup cité, mais plus à coups d'annonces et d'interviews que de véritables critiques de journalistes ayant vu la pièce -même si Rêve d'automne a été plutôt bien loti par rapport à d'autres. A ce jour, quelques critiques, donc : une dépêche AFP un peu fouillée, un article dans Le Figaroscope, une critique sur le blog amateur Théâtre du blog et un billet d'humeur sur le blog d'Armelle Héliot, journaliste au Figaro. Pour l'instant, rien, ou presque, du côté de la presse traditionnelle.
Alors quoi? Attachée de presse et chargés de communication de l'Athénée feraient-ils mal leur boulot? Non, et la question est plutôt très mal posée, car le problème vient d'ailleurs et serait plutôt à chercher du côté de la crise de la presse. Comme les intervenants (dont votre serviteur) d'une table ronde organisée mardi dernier par la revue Mouvement au Point Ephémère le disaient, la rubrique "Arts et Culture" s'est transformée en "sortir" ou "loisirs", beaucoup d'articles ressemblent étrangement à des dépêches AFP à peine retouchées, le journalisme d'investigation semble en voie de disparition, bref, tout semble en oeuvre pour confirmer les propos de Michaël Schudson lorsqu'il décrit la réalité de la presse en ces termes cruels : "les représentants d'une bureaucratie recueillent une information fabriquée par les représentants d'une autre bureaucratie" (il me semble que c'était dans l'ouvrage collectif Mass Media and Society, mais j'ai un doute).
Pour diverses raisons éthiques, politiques, sociologiques et économiques, beaucoup de journalistes, de leur plein gré ou non, se retrouvent donc souvent à recycler conférences de presse, dossiers de presse et autres communiqués de presse (pourquoi forcément "de presse", d'ailleurs?) et proposent ainsi peu d'analyse ou de mise en perspective. Beaucoup pointent la concurrence d'internet et ses sites ou blogs dits alternatifs en oubliant que non seulement la plupart des sites internet ne proposent pas forcément une information différente, mais en outre que ceux qui prétendent davantage à l'analyse sont justement nés d'une déception face au journalisme institutionnel.
Il y aurait encore beaucoup à dire, et le format du billet quotidien m'oblige à abréger sur un sujet aux ramifications complexes. Pour en revenir à la critique d'art, vous pouvez pallier les défaillances des journalistes culturels (ou plutôt l'absence des journalistes culturels, parce qu'on commence à les chercher) en écrivant vos propres critiques, comme l'ont fait certains blogueurs dont j'aurai l'occasion de reparler. Ecrire sur un spectacle que l'on a vu est un exercice intéressant pour soi, un peu difficile au début certes, mais assez salutaire en ces périodes où les arts et la culture confinent au produit de luxe qu'on aime ou non -et point barre, on ne va quand même pas développer sur un bête spectacle....
L'idée n'est pas de piétiner des journalistes déjà à terre dans une concurrence absurde et démagogique entre amateurs et professionnels ou élite et voix du peuple mais plutôt de vous poser en spectateurs actifs : ce blog et ses commentaires vont sont ouverts! Et si vous voulez pousser la réflexion, lisez le dossier sur la critique paru dans la revue Mouvement de ce trimestre en prenant soin toutefois d'oublier certains articles moins pertinents…
Pour ceux qui préfèrent discuter plutôt qu'écrire, je vous rappelle qu'aujourd'hui se tient une rencontre sur le thème "Mettre en scène la musique" avec David Jisse, Patrice Martinet, Thibault Perrine, François Bazola et Paul Desveaux. Rendez-vous à 18h30 à l'auditorium Colbert du site Richelieu de la Bibliothèque nationale de France, 2 rue Vivienne dans le 2e arrondissement de Paris.
Bon jeudi!