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Coulisses

Philippe et la moquette qui brille

Posté le : 14 déc. 2017 05:55 | Posté par : Clémence Hérout
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Mercredi dernier, Philippe Caubère était interviewé par des lycéens en option théâtre pour un entretien diffusé en direct sur les pages Facebook, Twitter et Instagram de l’Athénée. L’intégralité est à revoir en différé ici.
 
 
 
 
Nous avons parlé du départ de Philippe Caubère du Théâtre du Soleil, de la part de réel et de romancé dans ses spectacles, des points communs entre Ariane Mnouchkine et sa mère ou encore de l’éventualité que les textes de Philippe soient joués par quelqu’un d’autre ou adaptés au cinéma.

Avec Alexandra, qui s’occupe des relations publiques de l’Athénée, et Benoît, leur professeur, nous avions travaillé avec la classe sur les questions à poser. À un moment de la réflexion, le sujet du décor, ou plutôt du non-décor, des spectacles de Philippe Caubère a surgi.

On pourrait imaginer en effet que Philippe s’installe sur n’importe quelle scène avec une chaise attrapée au hasard dans les coulisses. En fait, pas du tout : ses vêtements, ses chaussures, sa chaise, le plancher, la peinture du fond de scène et même les habillages des cheminées techniques sur le côté du plateau font l’objet d’une mûre réflexion.

En début septembre dernier, Philippe Caubère était ainsi venu à l’Athénée pour étudier le plateau : il était question d’installer des rideaux aux murs et de la moquette au sol.

 

 
 
Le problème avec la moquette, c’est qu’il faut choisir la couleur, mais aussi l’épaisseur, la brillance et la matière, en pensant à son rendu sous la lumière, à sa cohérence avec les costumes et le reste de la scène, à son confort ou aux marques qu’elle pourrait générer sous les pas — le type de chaussures portées par Philippe Caubère joue donc aussi un rôle.

L’équipe artistique et technique de Philippe avait apporté plusieurs échantillons de moquettes et de rideaux ainsi que quelques paires différentes de chaussures pour tester le tout en collaboration avec l’équipe technique de l’Athénée qui a tendu quelques pendrillons — et de Patrice Martinet, le directeur, passant l’air de rien.
 

 
 
« Les Repetto, c’est plus pour André Benedetto. Les baskets, c’est plus Clémence et Ferdinand. Physiquement, j’ai du mal avec les boots… Mais on ne peut pas jouer avec des baskets sur de la moquette. »

« Il faut surtout éviter de prendre une moquette qui brille. »

« – J’ai peur que de la moquette noire avec rideau noir, ça fasse catafalque
– Ou alors cela décolle le personnage, et la scène devient un écrin dont tu surgis… »

 

 
 
« Le problème, c’est qu’on n’aura jamais la même couleur de moquette et de rideau, car ce n’est pas la même matière. »

« – Les baskets, ce n’est pas possible, regarde, ça accroche sur la moquette.
– Et pourquoi ne pas faire fabriquer des chaussures qui auraient l’air de baskets, mais avec une semelle lisse qui glisserait sur la moquette ? 
– Si on ajoute quelque chose sur la semelle, les gens ne verront que ça. Ce qu’on voit le plus sur un plateau, ce sont bien les pieds des gens… »
 
 
 
« Oh là là, c’est moche ces marques sur la moquette ! »
 
« – Les boots me font mal là, mais quand je joue, je ne sens plus rien.
– Oui, peut-être, mais qu’est-ce que ça donne après la représentation ? »

« – Il est beau, le plateau de l’Athénée, mais la forme carrée des planches bloque la tête. Cela ne serait pas pareil avec des planches allant vers l’infini… Mais le bois et la couleur sont très beaux.
- On pourrait toujours faire fabriquer un nouveau plancher ?
- Je ne vais pas dépenser 50 000 euros dans un plancher ! »

 

 
 
« Je culpabilise de t’avoir fait porter ces valises d’échantillons de moquette, vraiment, ça pèse une tonne. »

« C’est vrai que c’est plus confortable de tomber sur de la moquette. Mais cela ne fait pas de bruit »

« Je crois que je vais répéter avec les boots pour voir ce que cela donne. Vu les températures à Avignon, je serai donc en boots avec un short. »

« – Le public vient te voir : il s’en fout, du sol. 
– Je ne peux pas raisonner de cette manière. Il faut que le spectateur voie ce que je vois moi. »

« C’est du chevreau, ça ? Mais Ferdinand ne peut pas porter de chevreau ! »


 
 
« Le plateau de l’Athénée est magnifique, il a vécu, tu as déjà joué dessus. Avec les pendrillons, c’est magnifique : il ne manque plus qu’un acteur et c’est toi. »

« J’avais fait la création avec des baskets, mais la connotation n’est plus la même. Aujourd’hui, tout le monde en porte. »

« C’est vrai qu’il a une très belle couleur, ce plateau. »

Pour découvrir le plateau, murs et chaussures choisis par Philippe Caubère, c’est jusqu’au 14 janvier à l’Athénée avec Adieu Ferdinand, un spectacle en deux volets : Clémence et Le Casino de Namur.
Denis Lavant joue en même temps un texte de Samuel Beckett, Cap au pire, dans la petite salle.

Bonne journée !
 
Clémence Hérout