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L'île noire

Posté le : 08 déc. 2016 06:00 | Posté par : Clémence Hérout
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L’opéra L’Île du rêve de Reynaldo Hahn d’après Pierre Loti a commencé avant-hier à l’Athénée. La semaine dernière, nous évoquions les sources d’inspiration pour le décor avec Olivier Dhénin, son metteur en scène, et Amélie Lauret, collaboratrice artistique à la scénographie.


Une fois le travail sur les images sources réalisé, il faut imaginer le décor. Pour cette étape, Olivier Dhénin insiste sur le peu de représentations existant de Tahiti au 19e siècle où se déroule L’Île du rêve, mais aussi sur le caractère inédit de cet opéra qui n’avait pas été joué en France métropolitaine depuis sa création :

« c’est compliqué de représenter un paradis perdu alors que tout le monde a une image de Tahiti aujourd’hui. Nous voulions éviter une image folklorique et rendre la mémoire de ce qu’était Tahiti à l’époque de Pierre Loti et Reynaldo Hahn — et ce d’autant plus que c’est la première fois que l’œuvre est jouée à Paris depuis sa création.
Nous pourrions proposer une interprétation complètement décalée si de nombreuses versions de L’Île du rêve avaient été données : mais il s’agit ici d’une œuvre qui a été oubliée pendant cent vingt ans, et que nous redonnons à découvrir. On lui doit un certain respect, car les spectateurs vont recevoir un opéra qui était perdu et qui reprend vie devant eux envers et contre tout. Cela fait dix ans que le directeur musical, Julien Masmondet, veut le faire.

C’est parce que nous nous sentons investis de quelque chose que nous avons plutôt opté pour une démarche un peu historique. Je me suis donc appuyé sur des documents d’époque que personne ne connaît : beaucoup croient que les Tahitiens sont habillés en paréo avec des colliers de fleurs, mais cela appartient plus à un certain imaginaire colonial.
On nous dit parfois que les décors et costumes de notre Île du rêve sont austères, mais les gens étaient habillés comme ça. Quand on regarde les photos de la création de L’Île du rêve à l’Opéra comique à l’époque, les chanteuses ont aussi des robes noires. »

Si l’équipe a opté pour une vision historique, elle n’a pas opté pour autant pour la reconstitution littérale : le Tahiti du 19e siècle est ainsi évoqué avec des matériaux contemporains comme le plexiglas.

Pour Olivier Dhénin, « le plus difficile a été de construire le paysage : c’est un paysage lointain qui fait aussi figure de jardin d’Éden. Mais je ne voulais pas risquer le kitsch d’un jardin d’Éden et donner à voir la dimension tragique de cette histoire très dure.
Même si l’opéra s’appelle L’Île du rêve, il est très ancré dans l’histoire. Le roman de Loti dont il s’inspire est d’ailleurs très factuel : et même si Loti s’inscrit plus dans un rapport de découvreur que de colonisateur, la dimension coloniale ne pouvait être évitée. Cette dénomination d’Île du rêve est en fait un piège : ce n’est pas du tout une île de rêve !».


Rendez-vous demain pour aborder l’étape de la fabrication 
! Et pour voir la scénographie de L’Île du rêve en vrai, c’est à l’Athénée jusqu’à dimanche.

 
Clémence Hérout