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Entretien

Cigares, billets doux et boules de Noël

Posté le : 17 mai 2010 08:02 | Posté par : Clémence Hérout
Catégorie : Une Maison de Poupées | Artistes de la saison

Dans Une maison de poupées, Nora aime faire les décorations de Noël et mange du chocolat en cachette, Torvald vante l’esthétique de la broderie et ramène du travail à la maison, Kristine fait du tricot, Rank fume le cigare et Krogstad écrit beaucoup de lettres.

Et les acteurs du spectacle?


«Oui, j’ai fait de la broderie quand j’avais vingt-cinq ans, dans les années soixante-dix… J’étais bien entendu dans la mouvance “Flower Power”, et je brodais le dos de mes vestes en jean avec des panneaux bouddhiques: j’avais des tambours de différentes dimensions qui me permettaient de faire un travail ciselé; je faisais des grands Bouddhas assis sur des fleurs de lotus avec, de chaque côté, les quatre premiers disciples. Chaque dos de veste me prenait entre quatre et six mois de travail...»

«J’adore faire les décorations de Noël. Je n’ai pas eu de noël lorsque j’étais enfant, alors aujourd’hui je fais des noëls comme ceux que j’ai vus au cinéma. Je commence à chercher des cadeaux des mois avant, et chacun de mes enfants a sa couleur de papier cadeau pour visualiser immédiatement quels paquets sont à lui ou non. Mon compagnon me regarde avec des yeux ronds et fait un peu son Torvald à dire qu’on dépense peut-être trop de sous !...
J’ai été élevée à la campagne par des gens pas très riches, et je me souviens d’un noël où j’avais juste eu une clémentine et le livre du Petit Poucet. Et puis je passais Noël sans mes parents, parce que mes parents étaient divorcés, ce qui était rare dans les années 1960: j’étais la seule de ma classe dans ce cas...
À Noël, je fais semblant de laisser les enfants décorer, ou plutôt je replace les décorations derrière parce que ce n’est pas toujours très bien réparti dans le sapin…»

«Ah ah, bien sûr que je ramène du travail à la maison… Je ne peux pas faire autrement. Ce n’est même pas à la maison d’ailleurs, c’est 24h sur 24! Je travaille en dormant, en promenant les enfants, en faisant les courses... Oui, évidemment.
Être comédien, c’est un travail permanent —c’est d’ailleurs pour cette raison que l’on est arrivé à calculer que si l’on compte tout le travail que nous avons à faire en dehors des répétitions et des représentations, nous les interprètes, nous sommes rémunérés entre 1,75 et 2,25 euros de l’heure en moyenne…»

«Ah non! J’ai mon jardin secret, mais je n’achète pas de chocolat en cachette, jamais! J’assume même complètement ce genre de choses, à ce niveau-là je suis même plutôt provoc’ comme femme…»

«Oui, j’écris des lettres à plein de gens, j’adore écrire. On a toute la place que l’on veut… En général, j’écris quatre ou cinq feuillets recto-verso. Hier par exemple, j’ai écrit à quelqu’un à qui j’écris souvent, parce que j’avais besoin de lui écrire. Pour moi, écrire est l’une des choses les plus importantes; j’arrive à écrire des choses que je n’aurais pas pu écrire avant.
Je n’écris pas pour me dissimuler, dans le sens où je n’écris pas des choses que je n’arriverais pas à dire dans la vie, mais c’est sûr que je ne formule pas les choses de la même manière à l’écrit ou à l’oral. L’écriture, c’est une musique, un rythme, un souffle, une ponctuation, le vent, l’herbe, l’espace, les bruits, le hors-champ… C’est important le hors-champ, l’endroit où tu écris:  quand il y a de l’orage, j’écris très bien par exemple, j’adore cette ponctuation du claquement ou des roulements du tonnerre.
J’écris à la main: je déteste écrire avec un ordinateur parce que je mets quatre heures à trouver une touche... Par contre, qu’est-ce que j’écris mal... Il y a des gens qui ont une belle écriture, j’en suis très jaloux. Mes destinataires prennent parfois du temps pour répondre aux premières lettres que je leur envoie car ils mettent quinze jours à tout défricher —je dis bien “défricher”, comme un jardin… Mais ensuite, il s’habituent à ma manière de ne pas fermer les voyelles (je ne ferme pas mes a, on dirait des u), de mettre des grandes barres aux t, de mal mettre les pieds de mes p… Je ne sais pas si cela signifie quelque chose.
Hier, il m’est arrivé un truc incroyable: installé à une terrasse au soleil, je me suis rapidement aperçu que la jeune femme à côté de moi était ostensiblement en train de lire ce que j’écrivais. Alors je lui demande: “vous lisez ce que j’écris?” et elle me répond avec une voix très douce:  “oui je m’en excuse, je ne peux pas m’en empêcher... Mais je ne lis pas ce que vous écrivez, je regarde votre main écrire...” Du coup, on a parlé écriture et littérature arabe, parce qu’elle était marocaine.»

«Oui, cela m’est arrivé de tricoter pour mon beau petit-fils. J’ai commencé à lui tricoter une couverture très colorée, mais je n’ai pas fini d’assembler les carrés. Le pauvre, il a déjà deux mois et demi et il n’aura sa couverture que pour cet été...
J’avais aussi tricoté pour ma fille, un truc qu’elle n’a jamais mis, ce sont ses poupées qui l’ont porté… Et je l’avais tricoté en bleu parce que je pensais que ce serait un garçon. Parfois j’ai des accès d’instinct maternel où je suis contente de faire quelque chose avec amour, où je choisis la laine, où je passe du temps… Mais je n’aime pas spécialement tricoter non, je préfère écrire.»

«Je ne fume jamais le cigare, j’ai horreur de ça. Même l’odeur de la fumée de cigare, ça me fait vomir. En revanche je n’ai pas de problème avec la cigarette, ni avec le whisky d’ailleurs. Et après le spectacle, quel bonheur de boire un très bon vin !»

 

Ce soir, les acteurs d'Une maison de poupées font relâche pour laisser place à la pianiste Claire-Marie Le Guay pour son concert Piano Sostenuto où elle interprétera Brahms, Chopin et Karol Beffa.

Bon lundi!